Le paradis des animaux

Le paradis des animaux

La photo de couverture est de Nan Goldin et l’on pourrait penser qu’en illustrant le titre elle ironise quant à ce que sont ces animaux… Il n’en est rien et si à propos de l’auteur on parle de Tchékhov ou de Raymond Carver je pense qu’il est plus question d’un tendre cynisme ou d’un cynisme teinté d’humanisme que d’ironie.

Il s’agit d’un recueil de nouvelles et mon conseil habituel pour ce genre de livre est encore plus fondé que d’ordinaire. Il faut absolument éviter de « saturer » sinon vous perdez l’intérêt pour les textes, la grisaille un peu crasseuse devient vite noirceur. Dans le cas des auteurs américains je vais d’abord lire qui ils se permettent de remercier. Là ils sont nombreux et un lecteur européen n’y reconnaitra peut-être personne, il n’empêche, l’auteur se veut modeste… Avant d’aller plus loin et de vous parler en détail de quelques textes, je voudrais faire remarquer que, soit effet de traduction, soit uniformisation de la langue, les écrits anglo-saxons d’aujourd’hui semblent sans effets de style.

Fidèle à mes habitudes j’ai abordé ma lecture par le texte le plus court. Cela permet de mesurer la force, la puissance de l’auteur et de juger subjectivement de son originalité. « 100% coton » est un texte dense et original. Le personnage principal est suicidaire et infirme (?!), il est menacé par un délinquant qui lui réclame son portefeuille, il refuse de le donner et de mourir en tachant de sang sa chemise. Une ossature originale, non ? et la chair qui l’habille est agréable en bouche.

Ensuite comme il y en a une autre de courette me suis précipité. « Ce que veut le loup » est un texte étrange mais après « 100% coton » on y entre sans le moindre effort. L’homme voit un loup à sa fenêtre, il le fait entrer et le loup repart avec ce qu’il voulait : les chaussons fourrés offerts par le frère du donateur. C’est une histoire de clown triste d’une rare densité affective.

Puis je me suis fié aux titres : « La géométrie du désespoir » en deux parties raconte un couple qui a perdu sa petite fille par la mort subite du nourrisson. C’est présenté selon le point de vue de l’homme et cela va plus loin que le simple exercice de style ou de catharsis. Et si style de l’auteur il y a, c’est dans cette façon de raconter qui ne laisse rien au hasard mais ne cherche pas à émouvoir.

« James Dean et moi » traite des rapports entre un individu et le chien de sa compagne. Le texte établit un rapport entre le chien et l’homme comme si l’un et l’autre se partageaient la jeune femme…

Avant de vous laisser découvrir le reste, un mot sur le texte qui donne son titre au recueil. Dan, un père, a jeté son fils Jack par la fenêtre de la terrasse le jour où il a découvert l’homosexualité du jeune homme… A partir de là, ils ne se sont plus guère vus. Dan a payé les études de son fils et l’a aidé à emménager en Californie. Et là, Jack appelle son père parce qu’il est en train de mourir du sida. Dan qui vit en Floride prend sa voiture et va en Californie en se souvenant du temps passé avec son fils et en vivant des péripéties particulières… Attention ! c’est un texte qui laisse un fond d’angoisse ou d’amertume.

Un auteur à suivre.

Le paradis des animaux
Auteur : David James Poissant
Editeur : Albin Michel
Collection : Terres d’Amérique

www.albin-michel.fr

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