La terre des morts

Ce polar nous entraîne dans un monde de dépravation et de tourments tels qu’il n’est pas concevable de l’imaginer sans un esprit très retors.

C’est au Squonk, que tout a commencé. Une boîte de strip-tease située au troisième sous-sol d’un immeuble du Xème arrondissement de Paris.

Stéphane Corso est chef d’une unité à la crim et il se retrouve à devoir reprendre une enquête sur le meurtre d’une effeuilleuse qui n’a pas été résolue. Il a été marié à Emilya, une Bulgare haut fonctionnaire de l’état et il est le papa d’un petit garçon prénommé Thaddée. En pleine procédure de divorce, ses humeurs et états d’âme sont au trente-sixième dessous, d’autant qu’il considère la mère de Thaddée comme étant le mal absolu, une adepte du SM dur. Lui-même revient de loin. Ancien toxicomane, voyou dans une cité, il a été repêché par sa supérieure hiérarchique qui s’est mise en quatre pour lui donner une nouvelle chance de faire sa vie dans le droit chemin.

Sophie Sereys, alias Nina Vice, est la première victime, découverte ligotée par des sous-vêtements, la bouche cisaillée des deux côtés en un rictus abominable et avec une pierre coincée dans la gorge. Les nœuds utilisés relèvent du Shibari, une technique des nœuds pour ligoter sa partenaire, à l’époque un art martial qui était pratiqué par les samouraïs et les hommes de loi. Puis ces techniques ont été utilisées pour le plaisir. Une enquête approfondie sur la victime a démontré qu’elle était adepte du gonzo. Le gonzo, dans le porno, c’est un “réalisateur” filmant ses propres ébats, caméra à l’épaule, avec son propre pénis en guest-star. Pas de décor, pas de scénario, aucun moyen : juste du gros sexe qui tache. Bon marché, mal filmé, mettant en scène votre voisine de palier, le “wall-to-wall”, le “tout-sexe”, avait fait recette grâce à un mélange malsain de banalité et de hardcore extrême. Le terme gonzo dérive du “journalisme gonzo” des années 70, où le journaliste s’immergeait totalement dans son sujet, devenant un des protagonistes de son reportage.

Puis c’est une deuxième victime qui a été découverte, Hélène Desmora, la collègue de Nina Vice. Le cadavre a été découvert dans un terrain en friche. Comme la première victime, elle était nue, sans le moindre objet ni document permettant une identification. En position fœtale, elle était entravée par ses sous-vêtements. Comme Nina Vice, la femme s’était sans doute débattue et asphyxiée elle-même en forçant sur ses liens. Les blessures au visage étaient identiques aussi. Commissures charcutées, gencives à nu, pierre obstruant la gorge. Son trip à elle était d’avoir des rapports sexuels avec des cadavres. Tout un programme.

L’enquête conduit finalement Corso à Philippe Sobieski, un peintre célèbre qui avait purgé dix-sept ans de prison pour un meurtre dont les caractéristiques semblaient proches des deux meurtres à élucider. Son génie artistique s’est développé en prison et ses goûts en la matière sont proches de Goya et du Caravage. En matière de sexualité, celle-ci est pour le moins débridée.

Ce roman est une immersion dans un monde du porno où le hardcore côtoie le SM des plus durs et où l’imagination la plus fertile est certainement très loin de la réalité en matière de sévices sexuels.

Rien n’est simple et chaque évidence devient rapidement un trompe-l’œil. L’enquête est minutieuse mais parsemée de faux indices qui, finalement, conduiront Corso à une vérité qu’il n’était peut-être pas prêt à assumer.

Comme tous les romans de l’auteur, celui-ci est exceptionnel, sombre et dans un domaine dont il semble qu’il ait exploré les côtés les plus noirs.

La terre des morts
Auteur : Jean-Christophe Grangé
Editeur : Albin Michel

www.albin-michel.fr

La terre des morts
5.0Note Finale

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