Des vampires dans la citronneraie

L’illustration de couverture sur fond jaune rend compte du titre et le bref résumé de trois nouvelles en quatrième de couverture est un peu bavard.

Ce sont des nouvelles d’ambiance. L’auteure crée un monde et en perturbe l’ordonnancement par l’intrusion d’un détail, d’une idée. Tous les textes sont bons mais intéressants à des degrés divers. Et surtout elles ne se contentent pas de « raconter », elles contraignent insidieusement à penser. Je prends par exemple celle intitulée Règles à respecter pour soutenir son équipe dans l’Antarctique. Il est question de matches de la « chaîne alimentaire ». Et les équipes sont celle des Baleines et celle des Krills. Et c’est présenté comme dans un manuel à destination des supporters et on peut avoir l’impression d’être dans un dessin animé signé Tex Avery.

Pour moi deux textes sortent nettement du lot : De la soie pour l’Empire qui traite de jeunes filles emprisonnées pour tisser de la soie et Les nouveaux vétérans dans laquelle une masseuse a pour patient un individu qui a le dos tatoué de la scène macabre de la mort dans un piège de son meilleur ami. Ce sont des textes fascinants à cause, d’une part, de l’ambiance qui les construit et, d’autre part, du faux détachement avec lesquels ils sont écrits. Vous entrez tranquillement dans le texte, vous y trouvez vos aises et soudain cela dérape…

Je ne résiste pas au plaisir d’une citation que je trouve pince-sans-rire :

« Ne regarde pas en arrière, imbécile, se dit-il. Judicieux conseil, qu’Orphée avait donné à Lot. »

Bonne lecture.

Des vampires dans la citronneraie
Auteure : Karen Russel
Editeur : Albin Michel
Collection : Terres d’Amérique