Tout Catherine Colomb

Édition dirigée par Daniel Maggetti. Heureuse et intelligente édition qui propose plus de 1670 pages pour présenter l’œuvre de Catherine Colomb. Un gros livre bien fait qu’il convient de lire en le posant à plat sur une table. Ceux et celles qui ne connaissaient pas vont avoir un choc.

Avant d’être Catherine, elle est Marie et Marion, née en 1892, mais si elle est élevée dans le monde d’avant la première guerre mondiale, par des gens d’un autre siècle. Elle est quand même avantagée par rapport à la majorité des femmes de son temps, elle voyage, se cultive, étudie, décide de sa vie d’une certaine façon. Et surtout elle écrit. Au sens plein du mot. Elle note, elle prend note, des notes. Avec, je pense, dès le début l’idée non du romanesque mais celle de la mise en mots. Ce ne sont pas de simples notes informatives pour une mémoire précise, ce sont des transpositions de réel. Et c’est je crois ce qui fait la force de ses romans. Elle note pour écrire. Elle « travaille » ce qu’elle note en écrivant. Relisez son premier conte publié, il traduit une maîtrise certaine du récit. Vous remarquerez qu’il est simplement signé de deux initiales… Société oblige, les femmes n’ont pas le droit d’avoir du talent. En témoigne aussi l’accueil désobligeant et stupide réservé par deux universitaires à sa thèse si travaillée et si volontairement pro-Suisse.

J’aimerais pouvoir interrompre là ma chronique en vous disant de lire cette auteure au hasard de l’ouverture du livre pour le plaisir de quelques pages d’une rare densité. Mais on pourrait me reprocher de bâcler mon travail. Dans une interview radiophonique de 1962, elle nie avoir lu tous les auteurs auxquels on cherche à la rattacher et Jean Paulhan disait avoir découvert en elle un écrivain original, personnellement je me permettrai de la trouver unique en son genre. Elle « écrit » à sa façon, elle est son propre maître. Et si vous lui trouvez des accents d’untel ou d’unetelle, c’est par besoin, facilité, paresse ou lecture superficielle… Contentez-vous d’entrer dans le livre, vous allez voir : le sens, la force, vont monter à votre esprit et soudain vous serez LE lecteur qui perçoit le sens et la force des mots. J’avoue pour ma part une préférence pour sa thèse – qui m’a beaucoup appris – et pour son roman inachevé où son style atteint sa pleine maturité. C’est de la grande littérature. Et elle est bien servie par un appareil critique subtil et précieux. Chapeau bas !

Bonnes lectures…

Tout Catherine Colomb
Editeur : Zoé

www.editionszoe.ch

Tout Catherine Colomb
5.0Note Finale

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