L’histoire débute à Londres le 24 décembre 1843. Par une nuit enneigée, Elizabeth Scrooge, une jeune femme richissime, méprisée par ses semblables arpente avec dédain les rues bondées et illuminées de la capitale britannique à l’occasion du réveillon de Noël. L’héroïne de cette histoire est peut-être la misanthropie incarnée, mais on ne peut pas nier qu’elle possède un monde intérieur d’une extrême richesse. Solitaire, la financière a prévu comme chaque année, de rester chez elle pour éviter des festivités joyeuses qui la répugnent. Selon elle, les petites gens du peuple sont de pauvres bougres sans éducation. Ils profitent uniquement de cette période particulière pour oublier leurs dettes et leur vie misérable en s’offrant des futilités et en se souhaitant mutuellement le meilleur pour se donner bonne conscience. La nuit venue, le spectre de son ancien associé Jacob Marley, décédé sept ans auparavant apparaît au chevet de son lit pour lui donner une occasion unique de se racheter. La proposition consiste à accompagner trois esprits bienfaisants pour revivre des événements passés, voir ce que l’on pense d’elle aujourd’hui et découvrir ce qu’il adviendrait si elle persiste à mal se comporter et s’éloigner des autres…
Divisé en 4 couplets (Le spectre de Marley & trois Esprits), comme une pièce de théâtre, cette bande-dessinée tirée d’une célèbre nouvelle de Charles Dickens ne laisse pas le lecteur de marbre.
Présentée pour la première fois sous une forme féminine, cette histoire anglo-saxonne surprend autant qu’elle interpelle sur la cupidité des gens et la vie en communauté. Que l’on soit pour ou contre cette manière de voir les choses, nul doute que cette œuvre tombe à pic à un moment où nous organisons, nous aussi, les fêtes de fin d’année.
Cette aventure moralisatrice sur fond de festivités est originale et captivante. Rédigée il y a deux siècles par un auteur à succès, cette création n’a pas pris une ride. C’est avec audace et talent que José-Luis Munuera s’est emparé du classique de Charles Dickens Un chant de Noël pour en faire une œuvre du neuvième art. Superbement illustrée, cette BD conserve la trame originale du conte, mais à la place du vieux grigou d’Ebenezer, il a installé Elizabeth, une jeune dame hautaine, désagréable et pingre. Contrairement à son prédécesseur, elle force aussi l’admiration. Face à sa propre tombe elle concède un péché : l’ambition qui l’a animée pour ne pas être une femme soumise, dévouée et exemplaire. C’est avec la même franchise qu’elle répond aux esprits acceptant ses torts mais accusant également le seigneur d’être pire qu’elle. Manuera entrelace avec brio la précision photographique des décors londoniens, la vivacité des personnages et leur expression.
L’auteur de cette BD est né en 1972 à Lorca, en Espagne. Il a étudié les beaux-arts à l’université de Grenade puis est devenu dessinateur d’historietas. Au festival d’Angoulême, il a rencontré Joann Sfar avec qui il a écrit deux séries : Les Potamoks et Merlin. Le scénariste s’est lancé par la suite dans la création du délirant Sir Pyle S. Culape (Soleil) puis Nävis (Delcourt). Il a également signé quatre épisodes des Nouvelles aventures de Spirou. On lui doit d’autres succès tels que : Sortilèges, Fraternity, l’adaptation de Bartleby le scribe et Les Campbell Zorglub. Cette nouvelle histoire dramatique sortie en novembre 2022 est un récit complet en quadrichromie de 80 pages. Les fantômes sont de la partie pour le plus grand bonheur des fans du célèbre écrivain et des autres bouquineurs, petits et grands.
D’après la nouvelle de Charles Dickens
Scénario et dessins : José-Luis Munuera
Couleurs : Sedyas
Éditions Dargaud
www-dargaud.com
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