L’obscure clarté de l’air

Une couverture sobre mais qui peut intriguer et une accroche de quatrième de couverture très dense. Mais j’espère que vous n’avez pas besoin de cela, le nom de l’auteur vous suffit, non ? J’ai souvenir de deux Médée. Celle de Pasolini avec la grande Maria Callas (à voir et revoir en DVD) et celle de Jacques Lassalle en Avignon avec Isabelle Huppert (version Euripide), difficile de trouver mieux comme interprètes. Quel personnage attachant ! Vous venez de remarquer le tour que vient de me jouer la langue… je parle d’une femme et le masculin surgit, importun…

Vous vous souvenez de la magicienne, de l’épouse de Jason, de la mère infanticide qui se crée et se venge. La langue bistouri de monsieur Vann « autopsie » le mythe… et lui rend sa puissance. Magicienne, Médée a pour déesse Hécate à laquelle elle sacrifie. Attention, il faut se laisser porter par le style Vann. Ici lorsqu’il montre le sacrifice, le sang, le démembrement, la violence ce n’est pas tout de suite que vous vous rendez compte. La première allusion vous effleure, la seconde se distingue un peu et soudain vous la voyez vautrée dans…

Ce qui, à mon sens, rend ce livre moderne relève de deux choses. La première serait un peu paradoxale. Il me semble que David Vann raconte comme Homère et la deuxième vient des adjectifs qu’il choisit. Vous vous souvenez d’Homère et de son aurore aux doigts de rose… David Vann choisit des adjectifs qui rendent le récit réaliste, démythifient les personnages… (les Argonautes sont des voyous sans scrupules). Question : Peut-on recommander ce livre d’abord aux lectrices, plutôt qu’aux lecteurs ? Je ne me prononcerai pas car je crois qu’il doit être lu par les deux. Chacun doit prendre conscience de ce qu’est Médée, de ce qu’elle fait, comme elle a elle-même conscience d’être.

Bonne lecture.

L’obscure clarté de l’air
Auteur : David Vann
Editeur : Gallmeister