Il y a longtemps que je n’avais pas vu une illustration de couverture aussi subtilement réussie, riche et ‘juste’ au regard du contenu. Pour rester dans le genre élogieux, on appréciera la qualité de la traduction de Mathilde Tamae-Bouhon qui rend la lecture de ce court roman très agréable. On supposera aussi, sachant que le livre a été primé, que son écriture en japonais est plaisante à lire. Vu le sujet : une jeune femme au milieu de la trentaine s’invente une grossesse, j’aurais pu/dû ne pas chroniquer ce roman et pourtant je me sens légitimé à le faire… Parce que si elle tombe enceinte comme l’on dit c’est de la faute des hommes. Étant la seule femme de son équipe de salariés, c’est à elle qu’incombent toutes les tâches ‘annexes’ : préparer le café, le thé, ranger, passer une serpillère et un coup d’éponge… Le jour où on lui fait remarquer qu’elle a failli à cette tâche elle annonce qu’elle est enceinte et doit accoucher vers la mi-mai. (Là, je me suis permis de penser à Jane Birkin et à la chanson de Gainsbourg : Amour des feintes, pour le plaisir). Et à partir de là tout change. Et d’abord la jeune femme elle-même, en commençant par son regard sur le monde et les autres puisque autorisée à cesser son travail plus tôt elle voit d’autres gens et peut se préparer à manger… Au travail, elle bénéficie soudain de l’attention des autres, même des femmes des autres services. Pour simuler son état elle est obligée de l’apprendre, de faire des recherches… (le bestseller de Laurence Pernoud (1918-2009) est toujours disponible). Lorsqu’elle rentrera de son congé de maternité elle constatera que dans son entreprise sa grossesse a fait évoluer.

Le plaisir de lecture vient sans doute du fait que le lecteur (homme/femme) découvre avec l’héroïne la grossesse dans ses effets sociaux individuels et collectifs. Ce n’est pas mordant, c’est subtil et instructif et à mon sens très pédagogue. Citation, pour l’ambiance : « Je suis tombée enceinte il y a quatre jours.
– Tiens… les tasses sont encore là ? marmonne cet après-midi-ci le directeur du département en regagnant son poste.
C’est la fin de la journée, l’air ambiant empeste la cigarette. »  

Bonne lecture dans les transports en commun pour sourire et intriguer…

Journal d’un vide
Auteure : Emi Yagi
Editeur : 10/18

www.10-18.fr

Journal d'un vide
5.0Note Finale

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