La couverture est subtile et il me semble qu’elle rend assez compte de ce court ‘roman’. La quuatrième de couverture vous dit :« Sans nom ni visage, un homme fuit avec exactement 168 548 dollars… » et il se réfugie dans une ville, pour s’y fondre et mener une vie simple. Je ne suis pas sûr, qu’à l’instar de David Thoreau, il fasse retraite avec l’intention d’analyser son nouveau milieu. Pour moi il met simplement plus en évidence une paranoïa individuelle en choisissant de s’isoler et de perdre toute existence administrative pour échapper à d’éventuels poursuivants… A partir de là toutes ses interactions avec des personnes (sa logeuse, les enfants qui passent dans sa rue pour aller à et revenir de l’école, les gens de la bibliothèque qu’il fréquente, les migrants clandestins, les flics) accentuent sa paranoïa et sa maladresse. Cette maladresse, ses mensonges, son refus de donner son nom troublent le rapport avec les autres. Et pourtant il semble capable d’analyser sainement les situations et les personnes. Il y a en lui un peu du Meursault de Camus*, un peu du Adam de Le Clézio* qui lui seraient des cousins d’Europe. On notera l’importance des femmes dans cette histoire, surtout le discours d’Autumn, sa logeuse quand elle dresse le portrait de l’homme sans nom… Et je me permettrai de rappeler qu’au cinéma le héros sans visage est ‘joué’ en caméra subjective.
Conseil de lecture : si par hasard vous n’entrez pas tout de suite dans le récit, reposez le livre et laissez-le reposer un jour ou deux avant de reprendre, le temps de vous faire au rythme du personnage. Une citation : « C’est pourquoi tous les efforts pour changer le monde échouent, sont condamnés à échouer tant que les gens sont partie prenante. Car les gens sont des monstres. Tout système reposant sur l’hypothèse que l’homme est né bon est une blague. Et nous en sommes la preuve depuis des siècles. »…
Bonne lecture.
* Respectivement : L’étranger, Le procès-verbal
Sugar street
Auteur : Jonathan Dee
Editeur : 10/18
Laisser un commentaire