La mode semble être au bandeau illustré en guise d’illustration de couverture. Là on laissera à chacun le soin de décider laquelle des deux jeunes femmes représente la prudence, laquelle la passion. On entrera ensuite dans le roman en appréciant ou non sa prise directe avec la réalité qui nous entoure. Et on notera les petits commentaires ajoutés sans doute entre l’avant confinement et l’édition que vous allez lire. Comme signalé en quatrième de couverture l’auteure se cale sur Jane Austen – voir aussi l’intéressante postface – et ses personnages, en l’occurrence deux sœurs : Elinor, prudente et sage ; Marianne, audacieuse. Elinor devient Elena, Marianne reste et les deux se retrouvent dans la France d’aujourd’hui. L’idée est passionnante : que sont la prudence et la passion dans notre XXIème siècle ? Ce qui semblait juste à la fin du XVIIIème et au début XIXème (Jane Austen meurt en 1817) l’est-il encore aujourd’hui ? La lecture des oppositions entre Elena la prudente et Marianne la passionnée m’a laissé sur ma faim. Pourquoi ? Parce que Marianne et Elena m’ont paru d’une superficialité toute germanopratine. Leurs Sartre et Camus voire leurs Michel Foucault et Roland Barthes sont remplacés par les augures médiatiques de service. Gourous télévisuels ou journalistes d’une presse que Beaumarchais aurait peut-être du mal à reconnaître. Il me semble qu’Elena et Marianne se contentent de regarder la surface des choses… sans chercher plus loin que le bout de leur confort. Et là elles donnent à réfléchir et leur superficialité nous fait nous interroger sur ce que l’école a pu leur inculquer. Nous demander si elles ont été au cinéma, au théâtre, si même elles ont ouvert un livre… Et on a envie de leur dire d’éteindre la télévision et la radio et de se replonger dans Montaigne. Si je me souviens bien, ni le William Blake que l’auteure affectionne – avec juste raison – ni Jane Austen n’avaient à souffrir de ces deux « divertissements » que le bon Pascal aurait voué aux gémonies…
Bonne lecture.
Prudence et Passion
Auteure : Christine Jordis
Editeur : Albin Michel
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