Délivrances
C’est un livre court – à peine deux cents pages – mais d’une rare densité et à la couverture très subtile. Rien ne devrait vous empêcher de le lire.
L’auteure est Prix Nobel de littérature et je suis bien d’accord avec vous, selon les époques et les pays cela n’est pas toujours synonyme de qualité pour tous les lecteurs. Mais là, outre la qualité de la traduction, le livre est passionnant. D’une part, parce qu’il est remarquablement écrit. Tant sur le plan de la présentation des personnages que sur celui de la construction. Imaginez que ce qui est raconté l’est par les différentes protagonistes et se croise – comme dans les portraits croisés. Ce sont/c’est des histoires de femmes. Et parce que c’est bien écrit/raconté cela peut et doit intéresser les lecteurs masculins. Pour les lectrices, il va de soi qu’elles feront mieux que reconnaître une sororité certaine, elles comprendront pourquoi la mère de Lula Ann préfère que sa fille l’appelle « Sweetness » plutôt que maman ou pourquoi Lula Ann se fait appeler Bride… Vous avez compris – excepté Sofia – les personnages principaux sont noirs… Et ce livre nous en apprend beaucoup sur les rapports entre noirs et entre noirs et blancs. Imaginez une église où il y aurait deux bibles sur lesquelles prêter serment : une pour les blancs, une pour les noirs.
On pourrait résumer Délivrances en remarquant l’importance du pluriel et en disant qu’il s’agit d’une deuxième naissance… Celle qui permet au personnage de devenir lui-même, d’être en quelque sorte délivré du poids des préjugés, des culpabilités varié(e)s que la société impose. (On notera qu’il s’agit du titre français, le titre original est traduit dans les derniers mots de Sweetness, les derniers mots du livre.)
Je ne saurais me priver d’une citation, d’une petite phrase insidieuse : « Quels que soient nos efforts pour ignorer la vérité, l’esprit la reconnaît toujours et veut de la clarté. »
Bonne lecture.
Délivrances
Auteure : Toni Morrisson
Editeur : 10-18
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