Il s’agit à la fois d’un recueil de neuf nouvelles et d’un premier livre, ce qui me semble rare dans le paysage éditorial francophone. Neuf nouvelles pour convaincre le lecteur d’acheter le prochain livre de l’auteur… Et c’est convaincant !

Tâchez de faire une petite expérience. Oubliez la couverture et ne regardez pas la quatrième de couverture, lisez comme si vous ne saviez rien de la couleur de peau de l’auteur et de celle des deux jeunes en couverture. Il vous faudra un certain temps, je pense, à la lecture du premier texte pour vous rendre compte que les deux garçons et les deux filles de l’histoire sont des noirs. Essayez encore avec la nouvelle éponyme, l’effet, à mon sens, est encore plus fort, même s’il va de soi que le prénom de Lincoln peut paraître plus fréquent chez les noirs. Si vous voulez mesurer la force de ces textes laissez un grand écart entre chaque lecture. Faites en sorte que le texte lu vous revienne en mémoire. Ainsi, je pense que vous percevrez la puissance du déterminisme. Le poids des ghettos et de l’éducation qui favorise la continuité de la réalité en place. Et l’imagination d’un Freddy dans « Heureux je suis », ne sauve que pour un temps et encore avec des adultes compréhensifs. Celle des filles de « Rien qu’une bulle » est plus instantanée et brève. Et le « Je » de « La parade de j’ouvert 1996 » prend lentement conscience que tout ce qu’il imagine ne l’aide pas à vaincre son regret de son père chassé du logement familial.

Je m’interroge quant à « l’utilité » de ce recueil, non en opposition à une inutilité mais dans le sens où on peut se demander s’il va faire changer le regard des blancs et des noirs sur leur situation dans la société. Et je ne parle pas uniquement de la société étatsunienne. Enfin, dernière remarque, je cite quatre textes dont un seul porte une date dans son titre et j’ai l’impression à la lecture qu’ils pourraient (excepté « Lucky Man » à cause des portables) se passer aussi bien au milieu des années 70 qu’aujourd’hui… comme si ce qui était raconté n’avait pas vraiment d’âge…

Bonne lecture.

Lucky Man
Auteur : Jamel Brinkley
Editeur : Albin Michel
Collection : Terres d’Amérique

www.albin-michel.fr

Lucky Man
5.0Note Finale

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